Réalisation d’une enquête régionale sur les réseaux de chaleur
Exemple de la DREAL Pays-de-la-Loire
En 2011, dans le cadre des travaux préparatoires à l’élaboration du SRCAE, la DREAL Pays-de-la-Loire avait fait réaliser par le Cerema Ouest, un premier état des lieux des réseaux de chaleur présents dans la région, afin de compléter la connaissance du paysage énergétique régional.
Le SRCAE a été adopté en avril 2014. Il souligne dans son rapport, l’importance de développer les réseaux de chaleur dans le cadre du développement des énergies renouvelables régionales sans pour autant analyser en détail la place qu’ils peuvent avoir dans la stratégie énergie-climat régionale ; ces derniers ont et conservent un rôle important pour la transition énergétique des Pays-de-la-Loire, comme au plan national.
Certaines collectivités importantes, comme Nantes Métropole, les positionnent parmi les actions structurantes de leur plan climat énergie territorial. Dans les territoires ruraux, de petits réseaux de chaleur au bois se développent.
Malgré des objectifs nationaux ambitieux et une dynamique favorable relancée en 2009 par les lois Grenelle, les informations territoriales disponibles sur ce sujet sont assez limitées. Elles sont disponibles sous forme de synthèse nationale agglomérée pour les installations de tailles importantes (>3,5 MW) grâce à l’enquête nationale sur le chauffage urbain et la climatisation urbaine réalisée chaque année par le SNCU pour le Ministère en charge de l’énergie, mais au niveau local, et particulièrement pour les réseaux de petite taille, les données sont difficilement accessibles.
Forte de ce constat, la DREAL des Pays-de-la-Loire a souhaité réaliser en 2013 un panorama régional des réseaux de chaleur, par le biais d’une enquête. L’objectif était double : conforter la connaissance de la situation régionale par les services de l’État, et être en capacité de mettre à disposition de l’ensemble des acteurs intéressés ce panorama actualisé.
Cet article présente la démarche menée par la DREAL. Les résultats sont quant à eux présentés sur le site internet de la DREAL : Panorama des réseaux de chaleur des Pays-de-la-Loire et disponible sur la plateforme cartographique SIGLOIRE.
Méthode
Quels réseaux ?
Pour cette enquête, la DREAL a fait le choix d’inclure dans le périmètre non seulement les réseaux avec vente de chaleur à plusieurs utilisateurs (c’est-à-dire les réseaux qui sont généralement admis sous le terme de réseau de chaleur), mais également les réseaux dits “techniques”, qui correspondent techniquement au principe d’un réseau de chaleur (chaufferie, canalisations distribuant la chaleur, ensemble de bâtiments desservis) mais sans la notion de vente (usager unique). Il s’agit donc d’une différence notable par rapport aux données de l’enquête nationale réalisée par le SNCU, qui porte sur les réseaux avec vente. Par ailleurs, aucun seuil de puissance ou d’énergie livrée n’a été fixé : tous les réseaux connus ont été intégrés, même les plus petits.
Sources des données
La DREAL s’est appuyée sur le document d’aide à la réalisation d’un état des lieux régional des réseaux de chaleur, proposé par le Cerema. Ce document présente un ensemble de sources de données mobilisables, comment y accéder, leur périmètre et leurs limites.
En l’espèce, les sources suivantes ont été exploitées par la DREAL Pays-de-la-Loire : l’enquête nationale du chauffage urbain (réalisé par le SNCU pour le Ministère en charge de l’énergie), l’enquête sur les chaufferies bois (Fibois Pays-de-la-Loire), le présent site internet Réseaux de chaleur (Cerema) et la veille internet réalisée par la DREAL.
A partir de ce premier travail de collecte réalisé en interne, la DREAL a envoyé un questionnaire aux services techniques des collectivités pour lesquelles un ou plusieurs réseaux de chaleur avaient été identifiés sur leur territoire. Ce questionnaire était pré-rempli dans la mesure du possible, avec les données collectées à la première étape. Les données à compléter et/ou valider portaient sur l’année 2012 de fonctionnement du ou des réseaux de chaleur (énergie consommée, chaleur produite, longueur du réseau, types de bâtiments raccordés, date de création, types de montages administratifs, etc.). Par ailleurs, le courrier demandait aussi à la collectivité de signaler les éventuels projets de réseaux de chaleur sur son territoire.
Enfin, l’ensemble des données recueillies ont été traitées, avec l’assistance de la direction territoriale Ouest du Cerema, afin d’identifier les éléments significatifs, d’assurer le respect du secret statistique inhérent à ce genre d’enquête et de réaliser une cartographie.
Difficultés
Caractère non exhaustif
Compte tenu de l’incomplétude de chacune des sources de données prises isolément, et d’un taux de réponse aux questionnaires de 40% (courriers retournés par les collectivités), la DREAL ne peut garantir l’exhaustivité des résultats de l’étude. Ce travail étant une initiative volontaire et non une enquête obligatoire telle que peut l’être l’enquête nationale, il n’est en effet pas possible d’exiger la fourniture des données.
Les chiffres présentés (nombre de réseaux, puissance installée dans la région, énergie livrée, etc.) sont donc des résultats “a minima”, inférieurs ou égaux à la situation réelle. Ils ne correspondent qu’aux éléments recensés. La DREAL estime que ce premier travail, conduit en 2013 (sur les situations 2012), permettra par ses actualisations annuelles successives de couvrir de plus en plus de réseaux et ainsi approcher de la vision exhaustive du panorama régional (ce phénomène d’entraînement a été constaté au niveau national, avec une enquête annuelle dont le taux de réponse a fortement évolué depuis 2005).
Dans l’attente, afin d’éviter des erreurs d’interprétation, la DREAL précise dans le document publié le nombre de réseaux ayant renseigné chaque indicateur présenté.
Limites de l’enquête nationale et ciblage des demandes
La DREAL a par ailleurs dû composer avec le fait qu’une enquête nationale existe déjà, et qu’il convient d’éviter de multiplier les sollicitations des acteurs locaux. La difficulté est que bien que cette enquête permette au service des statistiques du ministère en charge de l’énergie de disposer de données détaillées individuelles, pour chaque réseau (bouquet énergétique, linéaire, montage juridique, puissance, énergie livrée…), ces données sont protégées par le secret statistique. Toute entité autre que le service des statistiques du ministère souhaitant disposer des données doit obtenir l’accord du Conseil national de l’information statistique, et s’engager elle-même à ne pas diffuser de données compromettant ce secret. Or, un des objectifs de la DREAL avec cette étude était de pouvoir mettre à disposition de tous un certain niveau de connaissance de la situation régionale.
Ceci explique en partie l’initiative de la DREAL d’envoyer ses propres questionnaires. Mais contrairement à l’enquête nationale qui interroge les exploitants, les questionnaires de la DREAL ont été adressés aux services des collectivités, les maîtres d’ouvrage. D’une part, ceci a permis de ne pas demander deux fois la même information à un même acteur, et d’autre part cette approche est cohérente avec l’idée de prise en main par les collectivités de la politique énergie-climat territoriale, pour laquelle les réseaux de chaleur constituent un de leurs outils.
Définitions et consolidation des résultats
L’enquête réalisée étant créée “sur mesure” par la DREAL, les données sources provenant d’organismes différents avec chacun leurs missions et leur logique, et les services interrogés étant ceux des collectivités qui ne disposent pas toujours d’une vision parfaite de leurs réseaux de chaleur, les résultats ont dû faire l’objet de quelques réflexions sur les définitions (est-ce que tel indicateur a bien été compris de la même façon par tous les répondants ?) et ajustements pour corriger des écarts issus d’erreurs manifestes. Ici encore, c’est en reconduisant régulièrement cette enquête que l’ensemble de la chaîne pourra progressivement aboutir à une uniformisation des modes réponses et à l’assurance que les définitions sont bien partagées.
Compte tenu de ces difficultés (données non exhaustives, existence d’une certaine marge d’erreur), la DREAL aurait pu décider de ne pas rendre publics les résultats. Mais elle a finalement estimé que ce n’était qu’en publiant qu’elle pourrait amorcer un processus d’amélioration. Afin de ne pas induire en erreur les utilisateurs des résultats, la DREAL a insisté, dans sa publication, sur les limites de l’exercice.
Temps de latence
Les résultats de l’étude ont été publiés à l’été 2014, mais ils portent sur la situation à fin 2012. Un premier élément d’explication tient à la façon dont les données relatives aux réseaux de chaleur sont habituellement collectées, notamment pour l’enquête nationale : il s’agit de bilans réalisés sur une année civile N (quantité de combustible consommé dans l’année, quantité de chaleur livrée dans l’année, etc.). L’enquête ne peut donc être amorcée qu’au début de l’année N+1.
La collecte des données en provenance des partenaires a également pu entraîner quelques délais.
Une autre difficulté tient à la nouveauté de l’exercice. La DREAL a dû développer sa méthode, définir ses indicateurs, créer les questionnaires… Son appui technique, la direction territoriale Ouest du Cerema, a également dû s’approprier ce sujet nouveau en matière d’analyse territoriale. On peut imaginer que pour les prochaines éditions, la publication sera chronologiquement plus proche de la situation qu’elle décrit. Ceci étant, l’enquête nationale réalisée par le SNCU, se situe dans le même ordre de grandeur de délais.
Résultats
Grâce à cette initiative, la DREAL Pays-de-la-Loire a été en mesure de rendre publique, pour la première fois, une note présentant le panorama actualisé des réseaux de chaleur dans la région. Cette note est accompagnée d’une carte (voir ci-dessus, également disponible sur SIGLOIRE), qui présente la localisation des réseaux recensés ou en projet (précision à la maille communale). Il apparaît ainsi qu’en 2012, la région Pays-de-la-Loire compte plus de 70 réseaux de chaleur (ou réseaux techniques) sur son territoire, dont 26 en Maine-et-Loire, département comptant le plus de réseaux (à titre de comparaison, l’enquête nationale recense 14 réseaux dans la région). Concentrés dans les grandes agglomérations, les gros réseaux de chaleur fournissent de la chaleur et de l’eau chaude à de nombreux habitants. La région comprend également un grand nombre de réseaux de chaleur de petite taille (plus de la moitié des réseaux ont une puissance inférieure à 1MW), situés dans les communes rurales des différents départements. Depuis 2010, avec la mise en place du fonds chaleur, on constate un accroissement important du nombre de réseaux de chaleur mobilisant majoritairement une énergie renouvelable. Ce constat témoigne d’une dynamique territoriale pour les réseaux vertueux favorisant ainsi la mise en œuvre de la transition énergétique régionale.
En dehors de la DRIEE et de la DRIEA Ile-de-France, qui ont conduit une étude très détaillée sur les réseaux de chaleur dans le cadre de l’élaboration du SRCAE et ont publié un certain nombre de résultats sous forme cartographique, c’est la première DREAL à avoir réalisé une telle démarche sur ce sujet. Les tableaux de bord régionaux en matière d’énergie renouvelable sont en effet plus généralement dédiés à l’éolien et au solaire photovoltaïque, donc plus fortement orientés électricité.
Outre cette publication, la démarche a permis de consolider, en interne à la DREAL, une compétence en matière de réseaux de chaleur, et de commencer à créer des liens avec les acteurs locaux sur cette thématique.
Suite envisagée par la DREAL
Sur la base de ce premier travail d’inventaire, la DREAL souhaite reconduire et consolider son panorama régional sur les réseaux de chaleur. Ces panoramas permettront notamment aux collectivités en démarche plan climat d’avoir une évaluation de leur politique publique en matière de développement des énergies renouvelables.
La DREAL a réalisé une cartographie dynamique des réseaux de chaleur, librement accessible en ligne sur le site internet d’information géographique SIGLOIRE.
Ces initiatives s’inscrivent dans un mouvement plus large. La loi sur la transition énergétique confirme que la connaissance territoriale des réseaux de chaleur doit être développée. Les SRCAE intègrent de façon obligatoire un état des lieux régional des réseaux de chaleur, et les PCAET doivent les aborder dans leurs plans d’actions. Ceci est par ailleurs en phase avec le cadre européen soutenant la collecte de données cartographiques relatives à la chaleur – incluant les réseaux (cf. Eléments concernant les réseaux de chaleur dans la directive européenne sur l’efficacité énergétique).
Une mise à jour de ce travail de recensement régional des réseaux de chaleur a été effectuée en 2021 et publié en 2022.
Reproductibilité à d’autres régions
La démarche menée par la DREAL Pays-de-la-Loire est parfaitement reproductible par d’autres régions. Aucune spécificité régionale n’est venue faciliter la démarche, et à la différence du cas très particulier de l’Ile-de-France, il s’agit d’une région moyenne, dans laquelle les réseaux de chaleur ne sont ni particulièrement développés, ni particulièrement en retard par rapport au niveau national.
L’enquête a mobilisé deux chargés de mission énergie-climat généralistes de la DREAL et ne nécessite pas une connaissance approfondie du sujet des réseaux de chaleur. En lisant les ressources documentaires proposées par le Pôle Réseaux de Chaleur du Cerema, et en s’aidant du document d’aide à la réalisation d’un état des lieux régional des réseaux de chaleur, tout agent disposera du niveau de connaissance requis pour conduire une telle étude. Les directions territoriales du Cerema peuvent être sollicitées pour apporter un appui dans l’exploitation, le traitement et la mise en forme des données.
Les DREAL qui s’engagent dans une démarche de connaissance de la situation des réseaux de chaleur dans leur région sont invitées à se faire connaître du Pôle Réseaux de Chaleur du Cerema, qui pourra contribuer à la valorisation des résultats et à la mise en relation des services impliqués, d’une région à une autre.
Il est également à noter que le statut de service de l’État de la DREAL n’est pas intervenu dans la démarche ; un Conseil régional ou une agence régionale de l’énergie pourrait donc également engager une démarche similaire (à l’instar de l’observatoire des réseaux de chaleur en Rhône-Alpes par l’agence AURA-EE, par exemple).
Contacts :
PERRONNIE Albin - DREAL Pays Loire/MECC albin.perronnie[arobas]developpement-durable.gouv.fr
Mission énergie et changement climatique – DREAL Pays de la Loire mecc.dreal-paysdelaloire[arobas]developpement-durable.gouv.fr