Arrêté du 8 août 2013 portant règlement de la sécurité des canalisations de transport de vapeur d’eau ou d’eau surchauffée

L’arrêté du 8 août 2013 relatif à la sécurité des canalisations, publié au JO du 20 août 2013 fixe les modalités de conception, de construction, de mise en service et d’exploitation des réseaux de chaleur, lorsque les canalisations concernées transportent de l’eau surchauffée (> 120°C) ou de la vapeur d’eau. Il s’applique de manière obligatoire depuis le 1er janvier 2014.
Cet arrêté contient de nombreuses nouveautés par rapport à l’arrêté du 6 décembre 1982, qui était, lui, plus directif (il imposait des moyens tels que les matériaux à utiliser, la qualité des soudures, etc.). Ici, ce sont principalement des résultats qui sont imposés. Cet arrêté prévoit par exemple une analyse des risques, un dossier technique, un outil SIG et un dossier d’exploitation, le tout réalisé par l’exploitant (et le fabricant pour le dossier technique) et transmis notamment au service régional chargé de la surveillance des appareils à pression. En plus de mieux encadrer la sécurité et la pérennité de ces installations, l’arrêté assure potentiellement une meilleure concertation entre l’exploitant et le service régional, ainsi qu’une meilleure concertation lors de la pose des canalisations avec les « services publics, les collectivités, les propriétaires d’autres ouvrages ».
Note : Cet article repose sur les 3 premiers titres et le 5ème de l’arrêté en question.

Tranchée recevant des canalisations de réseau de chaleur en milieu urbain

Dispositions générales

Quel réseau ?

Le présent arrêté est applicable aux canalisations de transport d’eau surchauffée dont la température peut excéder 120 °C ou de vapeur d’eau, mentionnées au V de l’article 2 du décret du 13 décembre 1999 susvisé et répondant simultanément aux conditions suivantes :
― la canalisation ne relève pas du code minier ;
― la canalisation ne fait pas partie d’une installation mentionnée à l’article L. 511-1 du code de l’environnement ;
― la pression maximale admissible est supérieure à 0,5 bar ;
― la dimension nominale (DN) est supérieure à 32 ;
― le produit de la pression maximale admissible (exprimée en bar) par la dimension nominale est supérieur à 1 000 bar.

Ci-contre : canalisations isolées en attente de pose pour le réseau Centre-Loire.

Sur quelle partie ?

Une canalisation de transport comprend :
― les sections de canalisation implantées à l’extérieur des établissements qui produisent ou utilisent le fluide ;
― les sections de canalisations qui prolongent la canalisation de l’extérieur vers l’intérieur des établissements concernés jusqu’au premier organe d’isolement inclus ;
― les accessoires qui contribuent au fonctionnement de la canalisation ;
― les stations de pompage ;
― le supportage.
Elle englobe l’assemblage permanent reliant toute section soumise aux dispositions du présent arrêté à une section non soumise.

 


Un guide professionnel a été réalisé par une commission spécifique composée du SNCU (Syndicat national du chauffage urbain), d’un représentant du SNCT (Syndicat de la Chaudronnerie, Tuyauterie et Maintenance Industrielle), d’un représentant de l’AQUAP (Association pour la Qualité des Appareils à Pression) et du COPREC (Confédération des Organismes Indépendants Tierce Partie de Prévention, de Contrôle et d’Inspection), pour l’application de l’arrêté.

 

Ce guide est mentionné dans l’arrêté et il est destiné aux fabricants et exploitants des réseaux de chaleur (vapeur et eau surchauffée) de manière à ce que leur conception, leur construction et leur mode d’exploitation confèrent à ces réseaux des conditions de fonctionnement préservant la sécurité des personnes et des biens et la pérennité des installations.

Dispositions applicables à la conception, à la construction, aux épreuves et à la mise en service

Conception

L’arrêté demande une analyse des risques par l’exploitant. Celle-ci concerne la conception mais aussi la réalisation et la mise en service des canalisations. La partie 2 du guide professionnel y est consacré.


L’arrêté fixe également des valeurs seuils  :
« Sont autorisés les matériaux en acier non alliés ou faiblement alliés, sous une pression égale à la pression maximale admissible, qui présentent les caractéristiques suivantes :

  • la contrainte admissible n’excède pas 60 % de la limite conventionnelle d’élasticité à 0,2 % du métal à la température maximale admissible ;
  • l’allongement après rupture est au moins égal à 20 % : cette valeur est donnée par un essai de traction exécuté sur une éprouvette prélevée en long telle que la longueur initiale entre repères soit égale à 5,65 S0, S0 étant l’aire initiale de la section transversale de la partie calibrée ; si une autre longueur entre repères est utilisée, l’équivalence avec la condition précédente est établie conformément aux dispositions de la norme NF EN ISO 2566-1er septembre 1999 ― Acier ― Conversion des valeurs d’allongement ― Partie 1 : aciers au carbone et aciers faiblement alliés. »

Et l’arrêté renvoie au guide professionnel pour les référentiels d’habilitation des organismes, ainsi qu’aux dispositions de l’article 10 du décret du 13 décembre 1999.

Construction

L’arrêté fixe des conditions telles que :

  • l’obligation d’un passage en caniveau, en enveloppe ou galerie des canalisations sous les voies ouvertes à la circulation publique
  • les autres modes de pose comme l’aérien sont encadrées par le guide professionnel et l’analyse des risques
  • la profondeur de pose est établie par l’analyse de risques mais ne peut être inférieure à 40 cm sauf exceptionnellement (franchissement d’un obstacle ou passage dans un ouvrage d’art) avec des mesures compensatoires
  • les canalisations doivent être signalées par un dispositif avertisseur
  • des dispositifs qui protègent en cas d’excès de pression ou de température doivent être prévus
  • la pose de canalisations doit se faire en concertation avec les « services publics, les collectivités, les propriétaires d’autres ouvrages afin de garantir l’intégrité des constructions et des ouvrages voisins du chantier. »

Épreuves et mise en service

Des épreuves et essais doivent être réalisés sur les canalisations pour s’assurer de leurs résistance et étanchéité. Pour les plus grandes canalisations (DN supérieure ou égale à 100), cela doit être encadré par un organisme habilité.


Un dossier technique doit être transmis à l’exploitant par le fabricant avant la mise en service des canalisations. Ce dossier comprend notamment les caractéristiques de la canalisation, le plan du tracé de la canalisation, une explication sur la façon de relier les éléments de la canalisation aux emplacements où ils sont installés, les différentes attestations de conformité.


Avant la mise en service, l’exploitant doit envoyer au service régional chargé de la surveillance des appareils à pression notamment la description et le tracé de la canalisation. Sans accusé de réception du service régional, la canalisation ne peut être mise en service.


L’exploitant doit mettre en place un SIG (système d’information géographique) et le communiquer au service régional chargé de la surveillance des appareils à pression dans les 12 mois après la mise en service de la canalisation et, pour les réseaux existants, dans les 3 ans après la publication de cet arrêté, soit avant le 20 août 2016, avec une mise à jour tous les 5 ans ou dans l’année qui suit une modification.

Cet outil permet l’édition cartographique, selon un système de coordonnées adapté aux zones traversées, du tracé de la canalisation et du positionnement de ses principaux accessoires.
L’outil cartographique est associé à une base de données permettant, pour chaque tronçon de la canalisation, de connaître au minimum les caractéristiques de construction, les données administratives le concernant ainsi que tous les éléments importants pour la sécurité de la canalisation.
La partie 4 du guide professionnel est dédiée à cet outil SIG, afin d’aider les exploitants à sa mise en place avec des recommandations fonctionnelles (objets à représenter) et techniques (format de fichiers, exports de données, échelle, type projection…).
Pour les plus petits réseaux (quand le produit de la longueur de la canalisation par le diamètre avant revêtement ne dépasse pas 500 m²), l’outil SIG peut être remplacé par un plan papier lisible avec les positions des principaux accessoires.
Cet outil SIG ou ce plan du tracé, transmis au service régional, pourront permettre à terme de compléter/alimenter la cartographie nationale du potentiel de développement des réseaux de chaleur et de froid, prévue à l’article 14 de la directive européenne sur l’efficacité énergétique

 

Exploitation

L’exploitant doit établir un dossier d’exploitation de la canalisation qui comprend :

  • le plan de surveillance et de maintenance (PSM)
  • le plan d’intervention
  • les documents relatifs aux diverses inspections et vérifications, y compris ceux relatifs au suivi des dispositifs de protection de la canalisation (notamment revêtement, protection cathodique) et des supports ainsi que les documents résultant d’interventions (réparation, modification)
  • l’ensemble des rapports et comptes rendus des essais et vérifications résultant de l’application du plan de surveillance et de maintenance pour la période déterminée

Le PSM et le plan d’intervention sont à transmettre au service régional chargé de la surveillance des appareils à pression dans l’année qui suit la mise en service de la canalisation (ou dans l’année qui suit toute modification des plans).


Le PSM est à renouveler au minimum tous les 10 ans (la période précise est déterminée par l’exploitant). Il contient les suivis et dispositifs mis en place pour la prévention des fuites, le maintien en bon état des canalisations, etc (voir le guide professionnel pour les canalisations existantes,datant d’avant janvier 2014). Et pour les canalisations de plus de 30 ans, le PSM « décrit les dispositions prévues (expertises, contrôles, essais réalisés sur la base de prélèvements) pour justifier, pour une période ».


Le plan d’intervention est à faire suivant le modèle inclue dans le guide professionnel.  Il définit les modalités d’information, d’intervention et de mise en place des secours en cas d’accident ou d’incident. En cas de mise en danger, d’incident ou d’accident, l’exploitant met en place ce plan d’intervention et informe le représentant de l’État dans le département, le service régional chargé de la surveillance des appareils à pression et celui chargé de la sécurité civile.


Le représentant de l’État dans le département peut prescrire à tout moment l’abaissement de la pression maximale admissible ou des essais ou contrôles de tout ou partie d’une canalisation qu’il estime présenter un risque pour la sécurité des personnes et des biens.
Avant le 31 mars de chaque année, l’exploitant adresse au service régional chargé de la surveillance des appareils à pression un compte rendu d’exploitation relatif à l’année civile précédente.


L’exploitant conserve et tient à jour, pendant toute la durée d’exploitation de la canalisation, le dossier technique et le dossier d’exploitation de la canalisation.


En cas de changement d’exploitant, le propriétaire récupère ces dossiers afin de les remettre au nouvel exploitant.
Ces dossiers sont tenus à la disposition des agents du service régional chargé de la surveillance des appareils à pression.

Modalités d’application

Les dispositions de l’arrêté s’appliquent de manière obligatoire à compter du 1er janvier 2014, date à laquelle sera abrogé l’arrêté du 6 décembre 1982. Mais elles peuvent être mises en œuvre de manière facultative avant cette date. Les canalisations existantes, quant à elles, ne sont soumises qu’aux dispositions de l’arrêté relatives à la « procédure de mise en service et arrêt de la canalisation » (du chapitre III : Épreuves et mise en service), à l’outil SIG et à l’exploitation (titre III).


Les exploitants devront remettre avant le 1er juillet 2015 une déclaration attestant que les canalisations de transport qu’ils exploitent sont conformes aux prescriptions d’exploitation fixées par l’arrêté (titre III).