Réseaux de chaleur biomasse

La biomasse (essentiellement le bois) est une ressource particulièrement adaptée aux réseaux de chaleur, disponible sur l’ensemble du territoire national, renouvelable dès lors qu’elle est gérée durablement, présentant un bilan carbone neutre.
Cet article en présente les principes techniques, les conditions de mise en œuvre et les atouts.

Selon les chiffres 2019 publiés en 2020 par l’enquête Fedene/SNCU, 539 réseaux de chaleur ont recours à la biomasse soit 68 % des réseaux, 38 % d’entre eux dépassant les 80 % de cette source dans leur mix énergétique. La biomasse représente près de 24 % du bouquet énergétique des réseaux de chaleur.
D’ici 2023, la quantité de chaleur produite à partir de biomasse devra augmenter de 30% par rapport à 2014.


Pour en savoir plus : Article du site Cerema sur l’enquête annuelle

Les points clés

  • Situation 2019 :  539 réseaux biomasse recensés, 6,8 TWh thermique livrés/an et une consommation de 9,1 TWh PCI (soit environ 2,8 millions de tonnes d’équivalent bois) . Source : enquête annuelle sur les réseaux de chaleur et de froid, SNCU 2020
  • Objectif 2023 : 145 TWh de consommation finale de chaleur issue de la biomasse et 24,4 TWh de livraison de chaleur renouvelable et de récupération par les réseaux
  • Objectif 2028 : Entre 157 et 169 TWh de consommation finale de chaleur issue de la biomasse et entre 31 et 36 TWh de livraison de chaleur renouvelable et de récupération par les réseaux
  • Points forts : ressources bien répartie sur le territoire et actuellement sous-exploitée ; bilan carbone pratiquement neutre ; stabilité du prix de la chaleur produite.
  • Points faibles : contraintes de fourniture, acheminement et stockage du bois.
  • Pistes : substitution d’énergies fossiles par le bois dans des réseaux anciens ; poursuite du développement des petits réseaux en zone peu dense

Principes techniques

La matière organique comme source d’énergie

On appelle biomasse l’ensemble des matières organiques, animales ou végétales. Certains types de biomasse peuvent être utilisés comme sources d’énergie. Pour la production d’énergie calorifique, on utilise essentiellement les trois catégories de biomasse suivantes :
le bois  : biomasse forestière (directement issue de la sylviculture), sous-produits de l’industrie du bois, déchets. Le bois est le principal type de biomasse utilisé pour produire de la chaleur (97%), et la première source d’énergie renouvelable en France.
la biomasse agricole : résidus de récolte et déchets des industries agroalimentaires ; cultures énergétiques
les déchets organiques : valorisables par combustion ou méthanisation. Note : la valorisation énergétique des déchets organiques est détaillée dans l’article « Réseaux de chaleur et récupération ».

Exemple de réalisation : le réseau de chaleur bois de Villeny (41)

 Plaquettes bois réalisées à partir de déchets de scieries. Photo Cerema

Tas de plaquettes de bois

Un bilan carbone neutre

L’énergie contenue dans la biomasse est renouvelable : stockée lors de la croissance de la plante, elle est libérée lors de sa combustion. Le bilan carbone de l’utilisation de la biomasse comme source d’énergie est pratiquement neutre, à condition que l’on plante autant que l’on brûle, ce qui est le cas en France (gestion durable des forêts). Lors de sa croissance, la plante absorbe en effet du CO2, lequel est rejeté dans l’atmosphère lors de la combustion.
Les seuls rejets de carbone non compensés sont ceux qui sont générés par les opérations de découpe et de transport du combustible. Pour cette raison, et pour des raisons économiques, il est nécessaire de rechercher des sources de biomasse aussi proches que possible des chaufferies.

Graphique montrant le fonctionnement d'un réseau de chaleur biomasse

Infographie Cerema, Pôle Réseaux de chaleur et de froid

Fonctionnement d’un réseau de chaleur biomasse

Un mix énergétique pour gérer les variations de puissance : un réseau de chaleur biomasse dispose d’une unité de production d’appoint, alimentée par une énergie fossile, la combustion de biomasse étant inadaptée aux fortes variations de puissance, comme lors des pointes hivernales et des faibles consommations en été. Dans l’exemple ci-dessus, la chaudière bois fournit 80 à 90% de l’énergie totale sur un an, bien que sa puissance ne soit que de 60% du total requis lors des pointes.
Le principe est le même que pour tout réseau de chaleur (voir l’article «  Constitution d’un réseau de chaleur » ), la chaufferie principale étant ici alimentée en biomasse (généralement du bois). Elle est associée à une unité d’appoint utilisée lors des pointes (cf. schéma). Certaines chaufferies produisent également de l’électricité, par cogénération.,
Le combustible est livré par camion plusieurs fois par semaine, voire par jour sur les unités de forte puissance, en saison froide. Le bois provient de gisements aussi proches que possible de la chaufferie : forêts ou bocage des communes des environs, sous-produits et déchets de l’industrie locale du bois (scieries par exemple), déchets bois divers (élagage, palettes, bois de construction, etc.). Le bois peut être utilisé sous forme de plaquette forestière et bocagère (le plus répandu) ou sous forme de granulés.

Réseaux de chaleur biomasse : atouts, situation et perspectives

Atouts des réseaux de chaleur pour l’utilisation de la biomasse

Par rapport aux dispositifs individuels de chauffage au bois, la production centralisée et distribuée par un réseau présente un net avantage sur le plan de la préservation de la qualité de l’air : les chaufferies collectives sont en effet équipées de systèmes de traitement des fumées, ce qui n’est pas possible sur les dispositifs individuels pour des raisons de coût.
Par ailleurs, en zone dense, il est difficilement envisageable de multiplier les chaudières bois individuelles ou d’immeubles, car outre l’impact sur la qualité de l’air, se pose le problème de l’acheminement et du stockage du combustible, qui peut être rédhibitoire en ville.
Enfin, le fait de disposer d’une chaufferie de taille importante, rassemblant les besoins de plusieurs dizaines ou centaines d’utilisateurs, permet de sécuriser l’approvisionnement (meilleurs prix, garanties sur la qualité et la disponibilité, etc.).

Une filière en transformation

En France, l’usage énergétique de la biomasse est essentiellement thermique (98%).
Sur les 120 TWh de chaleur produites chaque année à partir de biomasse, les réseaux de chaleur ne représentent que 6,8TWh (2019).
Les réseaux de chaleur biomasse sont majoritairement de petits réseaux (80% ont une puissance inférieure à 3MW, et 3 sur 4 se trouvent dans des communes de moins de 5000 habitants), mais d’importantes chaudières au bois-énergie ont commencé à apparaître pour alimenter des réseaux urbains plus importants, souvent en substitution d’ancienne chaudières à énergie fossile. En 2019, deux tiers des réseaux de chaleur utilisent la biomasse dans leur mix énergétique.

Multiplier par 5 l’énergie produite à l’horizon 2030

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La loi de transition énergétique pour la croissance verte fixe à 160TWh l’objectif quantitatif de chaleur produite à partir de biomasse, à l’horizon 2023, soit une augmentation par rapport à 2014 de 30% environ. Cet objectif contribue à l’enjeu de multiplication par 5 de la quantité de chaleur et de froid renouvelables livrée par les réseaux de chaleur à l’horizon 2030.

Ces objectifs sont très largement compatibles avec le gisement de bois-énergie disponible en France, actuellement sous-exploité. La forêt occupe près de 30% du territoire métropolitain, et le massif forestier français, l’un des plus importants d’Europe, a augmenté de moitié depuis 1950. D’après l’Inventaire Forestier n° 24 du 1er trimestre 2010 de l’IGN, le gisement supplémentaire de bois (accessible) pour l’énergie s’établit à 12 Mm³ par an (30 MWh), plus 7,2 Mm³ par an de menus bois (19 MWh). Un effort important de gestion de parcelles délaissées sera toutefois nécessaire pour y parvenir. Comme pour les autres énergies renouvelables, l’utilisation de biomasse permet aux réseaux de chaleur de bénéficier d’aides financières (notamment le Fonds chaleur et la TVA réduite).

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 introduit l’obligation, par les Régions, de mettre en place un schéma régional biomasse (qui décline la Stratégie Nationale de Mobilisation de la Biomasse) dans les 18 mois suivants la promulgation de la loi pré-citée. Ce schéma, co-élaboré par les services de l’État et Conseil Régional, devra être révisé dans les mêmes conditions que le SRCAE (tous les 6 ans). Le schéma régional biomasse est constitué de deux parties :
un rapport analysant la production de biomasse actuelle et son potentiel de mobilisation,
et un document d’orientation comportant un plan d’actions.