Réseaux de chaleur – Coûts et aides publiques

À la différence des systèmes de chauffage individuels, un réseau de chaleur représente un investissement initial très important, mais des dépenses de fonctionnement plus faibles dans la durée. Afin d’en renforcer la viabilité économique, les acteurs locaux doivent ainsi intégrer les projets de réseaux dans une vision à long terme de l’évolution du territoire, et définir la solution qui permettra de desservir le maximum d’usagers pour une même somme investie.
Une étude actualisée chaque année par l’association AMORCE montre que les réseaux de chaleur constituent en moyenne une solution de chauffage compétitive, au bénéfice des usagers. Afin de maintenir cette compétitivité tout en permettant aux maîtres d’ouvrage d’investir dans des réseaux modernisés faisant appel aux énergies renouvelables et de récupération, plusieurs dispositifs de soutien financier aux projets ont été mis en place, notamment le fonds chaleur.

Intérieur de la chaufferie du quartie Malakoff à Nantes

Le coût d’un réseau de chaleur

Un amortissement sur le long terme


Du fait de l’important investissement initial[059] nécessaire pour construire la chaufferie et le réseau de distribution, l’amortissement de l’installation ne peut être effectué que sur de longues périodes, de l’ordre de 20 à 30 ans. En contrepartie, les coûts de fonctionnement sont plus faibles que pour les systèmes individuels. La part de l’investissement (fixée pour toute la durée de vie de l’installation) étant majoritaire dans le coût global du réseau, le prix de revient de la chaleur est moins sensible aux variations du coût des énergies, et est donc plus stable que celui des systèmes individuels. Cette stabilité des prix est encore renforcée si le recours aux énergies fossiles, dont les prix sont très volatiles, est limité.

 

Une nécessaire planification

Afin d’assurer l’équilibre économique d’un projet de réseau, il est indispensable de planifier les coûts et les recettes sur le long terme. Or cette planification soulève plusieurs questions : taux de raccordement au réseau, évolution des besoins des bâtiments, évolution de l’urbanisation… Afin de réduire ces incertitudes, le développement du réseau peut s’appuyer sur un schéma directeur, qui associe les différents acteurs du territoire autour d’une vision partagée sur les 10-15 années à venir.

Optimiser les paramètres

La viabilité d’un réseau repose sur différents critères ; un des plus déterminants est celui de la densité thermique, c’est-à-dire la quantité de chaleur livrée par mètre de canalisation construit. En effet, les coûts d’investissement et de fonctionnement du réseau étant en grande partie liés à sa longueur, plus la densité thermique est importante, moins le prix de revient de l’installation est élevé lorsqu’il est rapporté à l’usager. La densité thermique est très fortement liée à la densité urbaine, mais également aux caractéristiques thermiques des bâtiments.
Un autre facteur important est celui de la « durée de fonctionnement », qui est définie comme le rapport entre la quantité d’énergie produite chaque année et la puissance nominale de la chaudière. Plus elle est élevée, plus le réseau est économiquement performant.

La valeur courante est 2500 heures. La durée de fonctionnement dépend essentiellement de l’intermittence des besoins des bâtiments : plus ces besoins sont uniformément répartis, sur une journée et sur l’année, plus la durée de fonctionnement peut être élevée.

Ainsi, plus le réseau aura été conçu de façon optimale sur les critères de densité thermique, d’adaptation de la puissance aux besoins, de choix du mix énergétique, de performance des équipements (isolation des canalisations, rendement des chaudières et des échangeurs…), plus il sera économiquement solide et à même de proposer une chaleur à un prix compétitif pour les usagers. Au niveau local, il appartient à la collectivité, autorité concédante, de choisir l’exploitant qui offre le meilleur service au meilleur prix, puis d’en assurer un contrôle rigoureux dans la durée.

Quelques chiffres…

Modernisation d’un ancien réseau – Saint-Etienne-du-Rouvray (76) – 2009

Remplacement d’une chaufferie et d’un réseau à eau surchauffée datant des années 60 par une chaufferie bois et un réseau basse pression – 4000 équivalents-logements
Matériels installés :

  • 2 chaudières bois de 5 MW
  • 1 chaudière d’appoint gaz de 8 MW
  • 1 chaudière de secours gaz/fioul de 10 MW
  • Réseau : 5,3km dont 4 km renouvelés

Investissement total : 10 939 702 €HT dont :

  • Ingénierie : 1 261 155 €
  • Déconstruction : 445 150 €
  • Génie civil / VRD : 2 735 300 €
  • Équipement bois : 3 137 210 €
  • Réseau & sous-stations : 3 160 887 €

Bilan :

  • baisse de 6% sur les factures de chauffage
  • 3640 tep/an d’énergie fossile économisée
  • 8720 tonnes/an de CO2 évité

Source : ADEME Haute-Normandie

Création d’un petit réseau de chaleur bois – Caillac (46) – 2007

Réseau neuf pour une quarantaine de bâtiments publics et privés. Investissement total : 775 400 €HT, dont :

  • Chaudière bois (700kW) : 94 930 €
  • Appoint (700kW), hydraulique, régulation : 131 340 €
  • Génie civil, chaufferie, silo : 114 100 €
  • Réseau de distribution (2km) : 274 660 €
  • Sous-stations (46) : 61 040 €
  • Gestion technique centralisée : 35 700 €

Source : Préfecture/ADEME/Région Midi-Pyrénées


Canalisations : quelques ordres de grandeur

  • Zone dense : ≈ 1000€/m à 1500€/m
  • Zone peu dense ou en cours d’aménagement : ≈ 300€/ml
  • Un réseau moyen dessert 500-1000 logements/kilomètre
  • Coût d’usage du réseau : ≈ 6€/MWh

Source : Conseil Général des Mines, 2006

Le coût pour les usagers

Modalités de tarification

La facturation aux usagers se décompose en une part fixe liée à la puissance souscrite (part R2, correspondant au coût des infrastructures) et une part proportionnelle à la consommation (part R1, correspondant au coût des énergies utilisées).


Quelques chiffres

L’association AMORCE réalise chaque année, avec le SNCU, une étude sur les prix de la chaleur dans les réseaux et en comparaison avec d’autres modes de chauffage. Selon cette étude, en 2018 :

  • en moyenne nationale, le prix du chauffage par réseau de chaleur est de 73,7€/MWh HT, et 73,5€/MWh si le réseau utilise majoritairement des énergies renouvelables et de récupération (74,5€/MWh si le réseau utilise majoritairement des énergies fossiles) ;
  • l’écart entre les réseaux les moins chers et les réseaux les plus chers est très marqué : les prix varient de 25€/MWh à environ 180€/MWh
  • en moyenne et en coût global sur un logement type, le chauffage par réseau de chaleur (de l’ordre de 1200€/an TTC) est inférieur aux solutions de chauffage au gaz (de l’ordre de 1300€/an TTC pour un appartement moyen). Il présente en outre des atouts environnementaux.
Logo Fonds Chaleur et Certificat d’Economie d’Energie

Aides publiques pour les réseaux de chaleur renouvelable

Les aides de l’État

Créé en 2009, le Fonds Chaleur  a pour vocation de financer des projets de chaleur renouvelable dans l’habitat collectif, le tertiaire et l’industrie. Durant la période 2009-2020, le Fonds Chaleur a été doté de 2,6 milliards € pour soutenir plus de 6 000 réalisations représentant 9,4 milliards € de travaux et une production totale de chaleur EnR&R de 35,5 TWh/an (soit plus de 3 millions tep/an). Il est attribué, pour les réseaux de chaleur, sous la forme de subventions à des projets locaux ; la gestion régionale du fonds est assurée par l’ADEME, suivant des modalités (notamment des critères d’éligibilité) définies chaque année.
Par ailleurs, depuis 2006, le taux de TVA appliqué à la chaleur des réseaux alimentés majoritairement par des EnR&R est de 5,5% au lieu de 19,6% sur la partie R1. Ceci renforce l’attrait de ce mode de chauffage pour les usagers et offre une marge de manœuvre supplémentaire pour réaliser des investissements tout en maintenant la compétitivité du réseau.

Les aides des collectivités territoriales

Des Conseils régionaux et des Conseils départementaux apportent un soutien financier à la réalisation de réseaux de chaleur, dans le cadre de leurs politiques locales de soutien aux énergies renouvelables. L’aide entre collectivités peut également consister en une assistance technique, dans une logique de mutualisation des compétences et des services. Certains syndicats d’énergie départementaux apportent ainsi un soutien méthodologique aux communes et intercommunalités.

Les aides des collectivités territoriales

D’autres dispositifs peuvent contribuer à l’équilibre économique d’un projet de réseau de chaleur. Certaines opérations de travaux sur les réseaux de chaleur permettent par exemple d’obtenir des certificats d’économie d’énergie, qui peuvent être valorisés financièrement par leurs détenteurs.