Coût d’investissement d’un réseau de chaleur : quelques repères

Avertissement : l’objet du présent article n’est pas de permettre d’obtenir une indication précise du coût d’un réseau de chaleur, mais de faciliter l’appréhension d’un ordre de grandeur d’un montant d’investissement, en amont d’un projet. Le coût réel dépend de nombreux paramètres propres à chaque situation.

Limites de l’approche

  • une analyse des coûts de différentes solutions, visant à identifier celles qui sont les plus pertinentes sur le plan économique, ne doit pas se limiter à la comparaison des coûts d’investissement. En effet, certaines solutions (notamment les réseaux de chaleur) sont fortement capitalistiques mais peu coûteuses en fonctionnement (et avec de moins grandes incertitudes sur l’évolution des prix sur le long terme), tandis que d’autres solutions sont moins coûteuses à l’investissement mais plus fortement soumises à des coûts récurrents et fortement fluctuants tels que le prix des combustibles fossiles. Les éléments présentés ci-dessous ne portent que sur les coûts d’investissement des réseaux de chaleur et doivent donc être complétés.
  • de même, la comparaison de différentes solutions de desserte énergétique visant à identifier la (ou les) plus pertinente(s) ne doit pas se limiter à une approche économique, surtout lorsque le choix relève d’un acteur public. Les critères environnementaux (émissions de CO2, énergies renouvelables substituées à des énergies non renouvelables, qualité de l’air…) et sociaux (conséquences sur l’emploi local, prévention de la précarité énergétique, acceptabilité…) doivent également être pris en compte. Ces éléments ne sont pas détaillés ici.
  • les coûts indiqués sont les coûts d’investissement hors taxes et hors aides publiques : les différentes subventions (notamment fonds chaleur) ou autres mécanismes financiers (notamment certificats d’économie d’énergie) doivent être pris en compte si on souhaite réaliser un calcul du coût d’investissement du point de vue du maître d’ouvrage
  • ne sont également pas abordées dans cet article les questions de tarification de la chaleur (constitution du tarif, coûts pour les usagers…)

Coût d’investissement d’un réseau de chaleur – Quelques repères

Pour un rappel sur les éléments constitutifs d’un réseau de chaleur, voir la ressource documentaire : Constitution d’un réseau de chaleur

Ci-contre en photo, La chaufferie

Elle est constituée de plusieurs éléments :

  • les chaudières
  • les pompes et autres circulations
  • le silo ou le hangar pour stocker le bois dans le cas d’une chaudière bois
  • le bâtiment qui abrite les différents équipements
Une chaufferie

Le réseau de distribution

Chantier d’extension Réseau Haut-de-Garonne. Photo Bordeaux Métropôle
Photo : © Bordeaux Métropole

Le coût dépend essentiellement du diamètre (lui-même lié à la puissance) et de l’environnement de pose.
Selon un rapport du conseil général des Mines de 2006 (actuellement CGE, Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies), en zone urbaine dense, on compte environ 1000 à 1300€/ml de conduite double (aller + retour). En zone moins dense (petites villes) ou zones en cours d’aménagement, ce coût peut descendre à 300€/ml et moins.

L’étude ADEME-Perdurance sur les coûts d’investissement des réseaux de chaleur bois fait apparaître des tendances liées à la puissance de la chaufferie (C : coût moyen de la distribution, au ml, incluant les tranchées, les canalisations et les sous-stations) :
    • P = 200 kW : C = 302 €/ml
    • P = 750 kW : C = 315 €/ml
    • P = 4 MW : C = 484 €/ml

Il est toutefois souligné une très forte variabilité d’un cas à un autre, avec un facteur 3 entre les projets les moins coûteux et les plus coûteux au sein d’une même tranche de puissance. Ces moyennes sont donc à utiliser avec précaution.
La variation du coût moyen suivant la puissance s’explique par plusieurs facteurs. On sait notamment que les chaufferies de faible puissance correspondent souvent à des réseaux ruraux ou à des réseaux créés à l’occasion de la réalisation d’un quartier neuf ; dans ces deux cas, le coût des travaux de génie civil, au mètre de tranchée, est moins important (en secteur rural, du fait d’une moindre densité permettant un déroulement de chantier plus simple ; en quartier neuf, du fait de la réalisation du génie civil en parallèle d’autres travaux et avant la réalisation de la voirie).

Études, maîtrise d’œuvre et frais annexes

Sur la base de ces différents ratios, si on connaît la puissance à installer (fonction des pics de besoins de chaleur générés par l’ensemble des bâtiments raccordés, avec prise en compte du foisonnement) et le linéaire de réseau (estimable à partir de la longueur de voirie des quartiers concernés), il est possible de réaliser des estimations sommaires des coûts d’investissement de projets en fonction de ces deux caractéristiques simples. Voici quelques exemples :

  • petit réseau de chaleur bois (de quelques équivalents-logements à quelques dizaines) : puissance bois 250 kW à 1000 €/kW + 125 m de réseau à 300 €/m + études/frais = environ 320k€
  • réseau moyen (de plusieurs dizaines à quelques centaines d’équivalents-logements) : puissance bois 1 MW à 650 €/kW + 500 m de réseau à 315 €/m + études/frais = environ 880k€
  • gros réseau (plusieurs centaines d’équivalents-logements à quelques milliers) : puissance bois 4 MW à 500 €/kW + 2 km de réseau à 480 €/m + études/frais = environ 3,3 M€

L’étude Perdurance/ADEME fait également l’analyse de la répartition des différents postes de dépense dans le coût d’investissement total. En 2019, l’étude suivante :

Accès à l'étude "Les réseaux de chaleur et de froid : état des lieux de la filière" - ouverture nouvelle fenêtre

ADEME, IN NUMERI, Carpenè, L., Haeusler, L., 2019. Les réseaux de chaleur et de froid : état des lieux de la filière. 87 pages. Disponible sur : https://librairie.ademe.fr/energies-renouvelables-reseaux-et-stockage/818-reseaux-de-chaleur-et-de-froid-etat-des-lieux-de-la-filiere-marches-emplois-couts.html

dresse une évaluation de coût des projets réseaux de chaleur qui s’appuie sur les dossiers Fond Chaleur de 2013 à 2017. Les résultats sont à nuancer au regard de la représentativité des projets par rapport au parc des réseaux de chaleur.

Quelques chiffres de l’étude de 2019 sur le coût de la partie « réseau »

Pour les projets de création :

En moyenne, 2M€ par projet (en fonction de la taille du projet) avec 50 % des projets compris entre 190 000 et 2,15 M€.
Ramené en €/ml, les coûts moyens sont de 670€/ml (avec une médiane à 575 €/ml) avec 50 % des projets compris entre 416 et 732 €/ml.
Le coût en €/ml est fortement lié au diamètre des canalisations et à la densité thermique. Les réseaux « haute pression » (projets industriels notamment) coûtent en moyenne 2,3 fois plus chers (1 800 €/ml) que les réseaux « basse pression ».

Quelques cas réels

Afin de consolider le calcul réalisé sur un projet donné, en fonction de ses caractéristiques et des ratios précédemment indiqués, nous vous proposons ci-dessous des éléments issus de projets réels, qui peuvent servir de base de comparaison.

Les principales caractéristiques de dimensionnement (puissance chaufferie, linéaire de réseau, éventuellement nombre de sous-stations) et le coût total sont indiqués, de même que la part du coût représentée par la chaufferie et le réseau lorsque cette distinction est disponible.

Comment réduire le coût d’investissement

Le coût d’investissement peut être sensiblement réduit par plusieurs moyens, notamment :

  • chercher à mutualiser les travaux de génie civil (pose des canalisations) avec les travaux d’un autre réseau dont le tracé emprunte tout ou partie de celui souhaité pour le réseau de chaleur ;
  • faire appel à de nouvelles techniques, comme les canalisations souples (plastique pré-isolé), qui peuvent être livrées sur le chantier sous forme de tourets. Ceci permet une pose plus rapide et donc une réduction du coût du chantier ;
  • ce n’est pas toujours une option disponible, mais la rénovation d’installations existantes (notamment pour l’accueil des chaudières) est en moyenne moins coûteuse que la création ex nihilo ;
  • un accompagnement poussé par une AMO ou une association locale expérimentée apparaît souvent comme un facteur de meilleur encadrement des coûts.
Travaux d'installation de la pose des canalisations d'un réseau de chaleur dans les Hauts-de-Garonne et de mutualisation avec les Telecom